We'll come clean...
Vous voyez, ma vie actuelle me plaît dans sa globalité. J’ai des amis ici, à Nantes, des personnes sur qui je peux compter quoi qu’il arrive (en tout cas, je l’espère). Je suis à l’aise dans mes études, j’aime profondément ce que je fais, même si je ne sais pas quelle branche de métier m’intéresse. Je suis en bonne santé, mon nez ne coule pas, ma tête me fait mal de temps à autre mais rien de grave, je ne dors pas bien mais je supporte, ma jambe me fait souffrir mais pas au point d’avoir constamment mal.
Mais je me déteste. Je me déteste jusqu’au plus profond de moi, je me méprise d’être la personne que je suis, aussi négligente, inattentive aux autres et passive. À voir mon appartement, on penserait que je suis déprimée. C’est peut-être le cas, au fond, mais je pense que c’est surtout de la paresse. Je ne crois pas que j’étais comme ça « avant », avant d’avoir été détruite par quelques mois d’études. Je lutte encore pour retrouver un peu de volonté et de passion, quelque chose qui me donne envie de me lever le matin, de faire quelque chose de ma journée autre que d’assister aux cours. J’ai vraiment l’impression, parfois, de ne servir à rien, de ne rien faire de bien. Je ne parle pas de mon « utilité » pour les autres ou du « bien » pour les autres, mais par rapport à moi-même, car au fond je voudrais être un peu égoïste.
Je ne sais pas trop comment expliquer à mes amis l’inexplicable. Une fois, j’ai dit à une de mes copines que j’étais déprimée, j’ai eu le sentiment de me confronter à des moqueries, un air de « mais tu as tout pour être heureuse ! ». Merci pour la considération. Merci pour la compréhension. Merci pour la pointe de mépris. La « vraie » déprime, ça ne part pas en un claquement de doigts. Parfois j’envie ces personnes qui savent être heureuses. Je me regarde parfois et je vois quelqu’un qui fuit le bonheur. Les joies, je connais, tout le monde connaît, c’est si facile d’avoir des accès temporaires de bien-être. Moi, je me sens sèche, asséchée. Plus capable d’écrire, plus capable de ressentir.
Sauf de ressentir des choses pour des personnages de fiction. De pleurer en les regardant, de pleurer tout un week-end, de passer la nuit à pleurer.
Je ne sais pas trop ce qui m’arrive en ce moment. Cette apathie ne me sied pas, mais en même temps je n’ai envie de rien d’autre. Je ne me plais plus, je devrais donc changer car on ne change que pour soi (encore une marque d’égoïsme). Mais je n’ai pas assez d’énergie pour changer, à chaque fois que je finis par faire quelque chose que j’ai planifié depuis des jours, j’accomplis un exploit, comme descendre à la laverie, descendre les poubelles... alors, changer quelque chose de plus profond ? J’ai des problèmes plus profonds que mon bordélisme et mon manque d’hygiène (dans mon appartement, du moins, pas sur ma personne). Je suis complètement cassée et je ne me souviens plus du mécanisme de mon fonctionnement. Je suis brisée à l’intérieur mais ça ne se voit pas toujours à l’extérieur. J’aime cacher, je n’aime pas parler de moi à mes camarades, j’ai eu trop mal pour accepter qu’on me fasse du mal à nouveau.
Sauf que je ne peux pas tout maîtriser, voire je ne maîtrise rien. Nos choix influencent nos péripéties, certes, mais je ne suis jamais sûre de rien. Quand je lance un objet, je ne sais pas s’il va retomber là où je le voyais (lois de la nature) ou s’il sera emporté par le vent (circonstances extérieures). Quand je choisis de prendre le chemin A, je ne sais pas s’il me mènera à l’objectif A ou si la catastrophe B changera le cours des choses.
Je ne sais pas trop ce que je suis en train d’écrire. Je n’ai jamais vraiment cru au hasard, j’ai toujours pensé qu’une action avait des conséquences à peu près contrôlables. La vie n’est pas vraiment celle que l’on croit.
Je vais bien. Mais j’ai des dysfonctionnements.